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vendredi 7 février 2014

LE DOSSIER MEDICAL DE L'ETABLISSEMENT DE SANTE ET/OU DU PRATICIEN LIBERAL

INTRODUCTION

Les articles R. 1112-2 et R. 4127-45 du code de la santé publique disposent :

« Un dossier médical est constitué pour chaque patient hospitalisé dans un établissement de santé public ou privé ou en consultation externe »

« Indépendamment du dossier de suivi médical prévu par la loi, le médecin doit tenir pour chaque patient une fiche d'observation qui lui est personnelle ».

Dès lors, pour chacun de leurs patients, tant les établissements de santé que les praticiens libéraux doivent tenir un dossier médical dont la consultation par le patient et la communication à ce dernier est très encadrée par la loi.

I – LES BENEFICIAIRES DE L’ACCES AU DOSSIER MEDICAL

Selon l’article L. 1111-7 du code de la santé publique, « toute personne a accès à l'ensemble des informations concernant sa santé, détenues à quelque titre que ce soit par des professionnels et établissements de santé, qui sont formalisées ou ont fait l'objet d'échanges écrits entre professionnels de santé, à l'exception des informations mentionnant qu'elles ont été recueillies auprès de tiers n'intervenant pas dans la prise en charge thérapeutique ou concernant un tel tiers ».

La notion de « toute personne » vise :

  • le patient lui-même ;
  • les ayants droits du patient décédé ;
  • les titulaires de l’autorité parentale pour le patient mineur ;
  • le tuteur pour le patient, majeur incapable ;

Tout médecin, dont la communication du dossier médical est sollicitée, doit systématiquement demander un justificatif d’identité tel que :

  • la carte nationale d’identité du patient ;
  • le testament prouvant la qualité d’ayant droit ;
  • le livret de famille prouvant l’autorité parentale sur le mineur ;
  • le jugement rendu par le Juge des tutelles pour attester de la qualité de représentant légal du majeur protégé ;

Si le médecin a un doute sur l’identité de la personne sollicitant la communication du dossier médical et donc sur son droit à l’obtenir, le médecin doit refuser de communiquer ce dossier médical.

A défaut, si le dossier venait à être communiqué à une personne non bénéficiaire de ce droit, le médecin pourrait être poursuivi pour violation du secret professionnel.

1. Le patient majeur

a - Le patient en état d’exprimer sa volonté

Lorsqu’un patient majeur souhaite la communication de son dossier médical, le médecin ne peut pas s’y opposer.

Il est important de souligner que la demande du patient majeur n’a pas à être motivée.

Le dossier médical peut être soit, consulté sur place directement par le patient ou par l’intermédiaire d’un médecin soit, communiqué par voie postale.

C’est le patient qui choisit le mode de communication de son dossier médical.

Lorsque le patient ne fait aucun choix, le praticien informe ce dernier, qu’à défaut de choix, le dossier sera communiqué de telle ou telle manière.

b - Le patient hors d’état d’exprimer sa volonté

Le code de la santé publique ne prévoit que le cas du patient majeur en état de s’exprimer qui souhaite accéder à son dossier médical.

En effet, la loi ne prévoit pas le cas du patient hors d’état d’exprimer sa volonté, dont les proches souhaiteraient la communication du dossier médical.

Dès lors, théoriquement dans cette hypothèse, nul ne peut avoir accès au dossier médical de ce patient.

2. Les ayants droit du patient décédé

a - Définition de l’ayant droit

Ont la qualité d’ayants droit d’une part, les successeurs légaux du défunt et d’autre part, les successeurs testamentaires.

Par successeurs légaux, il faut entendre, le conjoint du défunt, les enfants du conjoint et/ou du défunt.

Avis de la Commission d’accès aux documents administratifs du 12/01/2012 : La Commission dite « CADA » a rendu un avis selon lequel elle refuse de communiquer le dossier médical demandé par les parents d’un patient décédé s’ils ne rapportent pas la preuve que le défunt n’a ni conjoint ou descendants ni légataires testamentaires.

La notion « d’ayant droit » est donc différente de celle de « famille » ou de « proche », un ayant droit n’ayant en effet pas nécessairement de lien de parenté avec le patient décédé.

b – Les motifs permettant aux ayants droit d’accéder au dossier médical du défunt

A l’inverse du patient majeur qui peut accéder à son dossier médical pour n’importe quel motif, les ayants droit ne peuvent accéder au dossier médical du patient décédé que dans trois hypothèses :

- connaître les causes de la mort du défunt ; - défendre la mémoire du défunt ; - faire valoir un droit ;

➢ Connaître les causes de la mort du défunt

Ce motif ne pose pas de difficultés particulières contrairement aux deux autres motifs.

En effet, tout ayant droit doit pouvoir connaître les raisons ayant entraîné le décès du De Cujus.

Le médecin, auquel la demande de communication du dossier médical est faite, ne devra communiquer que les seuls éléments relatifs aux causes du décès.

➢ Défendre la mémoire du défunt

L’ayant droit peut accéder au dossier médical d’un patient décédé si cet accès lui permet de faire cesser une attaque publique ou une rumeur infondée sur les causes de la mort du patient décédé.

L’ayant droit doit toutefois préciser au médecin, auquel il est demandé la communication du dossier, la nature de l’attaque publique et ce, afin de permettre au médecin de communiquer les seuls éléments d’information en rapport.

A défaut de précision apportée par l’ayant droit sur la nature de cette attaque publique, le médecin ne pourra communiquer aucun élément du dossier médical du De Cujus, sous peine d’engager sa responsabilité pour avoir dévoilé des informations couvertes par le secret professionnel.

➢ Faire valoir les droits de l’ayant droit

L’ayant droit peut solliciter la communication du dossier médical du patient décédé si cela lui permet de faire valoir un droit, tel qu’obtenir le bénéfice d’un contrat d’assurance ou d’un testament.

Exemples :

- Le contrat d’assurance :

Un ayant droit peut avoir besoin de connaître les causes de la mort du défunt lorsque celles-ci conditionnent le bénéfice de la garantie d’une assurance à son profit.

- Le testament :

Un ayant droit peut avoir besoin de savoir si le patient défunt était sain d’esprit au moment de la signature d’un testament lorsque cela conditionne le bénéfice de ce testament à son profit.

Il est important de souligner que la demande de communication du dossier médical ne peut émaner que de l’ayant droit lui-même.

Si le praticien communique le dossier médical à un tiers qui en fait la demande au bénéfice d’un ayant droit, celui-ci pourra être poursuivi pour violation du secret professionnel.

Arrêt de la Cour d’appel de DIJON du 31 mars 1988 : Un médecin a été condamné pour violation du secret professionnel et ce, pour avoir adressé, à la demande d’un notaire, un certificat médical où il y était mentionné que son patient avait été traité pour une affection de longue durée et qu’il avait toutes ses facultés mentales au moment où il avait contracté le testament contesté.

c – Les informations communicables à l’ayant droit

Le praticien n’a pas l’autorisation de communiquer à l’ayant droit qui en fait la demande l’entier dossier médical du patient décédé.

Il ne doit en effet communiquer que les seuls éléments d’informations qui sont nécessaires à la réalisation d’un des trois objectifs de l’ayant droit (Arrêt du Conseil d’Etat du 26 septembre 2005).

Si le praticien estime qu’il ne doit pas communiquer d’éléments du dossier médical à l’ayant droit, il peut en refuser la communication mais doit alors inscrire et motiver son refus dans le dossier médical du patient décédé.

3. Les titulaires de l’autorité parentale pour le patient mineur

a - Principe

Seuls les titulaires de l’autorité parentale peuvent accéder au dossier médical de leur enfant mineur, étant toutefois rappelé que les titulaires de l’autorité parentale ne sont pas nécessairement les parents de l’enfant mineur.

b – Exceptions

  • Le mineur non émancipé

Le mineur non émancipé peut demander au praticien à ce que ses représentants légaux n’accèdent à son dossier médical que par l’intermédiaire d’un médecin.

Le choix du médecin intermédiaire est fait par les titulaires de l’autorité parentale sauf si :

- Les titulaires de l’autorité parentale ne sont jamais intervenus dans la prise de décision concernant la santé du mineur ; - Le mineur bénéficie à titre personnel du remboursement des prestations en nature de l’assurance maladie ; - L’âge du mineur, sa pathologie ou le contexte le justifie etc.

Le mineur non émancipé peut vouloir garder le secret sur un traitement ou une intervention qu’il a subi.

Dès lors, quelque soit l’âge du patient mineur qui en fait la demande, le médecin est tenu de garder le silence sur ce traitement ou cette intervention et ne devra pas communiquer, aux titulaires de l’autorité parentale qui sollicitent la communication du dossier médical du mineur, les éléments d’informations en rapport avec ce secret.

Le praticien doit toutefois toujours tenter de convaincre le mineur d’informer ses représentants légaux de la réalisation de ce soin ou de cette intervention.

  • Le mineur émancipé ou en rupture avec ses parents

Le mineur émancipé de plus de 16 ans ou en rupture avec ses parents a seul accès à son dossier médical comme n’importe quel majeur.

4. Le tuteur pour le patient majeur protégé

Seul le tuteur peut accéder au dossier médical du majeur protégé.

Toutefois, il est nécessaire que la tutelle porte sur la personne même du majeur protégé et pas seulement sur ses biens.

En effet, lorsque la tutelle est une tutelle seulement « économique », le majeur protégé reste libre des décisions concernant sa santé et seul ce dernier peut dès lors avoir accès à son dossier médical.

Le médecin doit donc systématiquement demander au tuteur, sollicitant la communication du dossier médical du majeur protégé, qu’il justifie de sa qualité en produisant la copie du Jugement rendu par le Juge des Tutelles.

Il sera souligné qu’en cas de curatelle ou de sauvegarde de justice, seul le majeur protégé peut avoir accès à son dossier médical.

II – LES INFORMATIONS ACCESSIBLES DU DOSSIER MEDICAL

1. Principe

Selon l’article L. 1111-7 du code de la santé publique, « toute personne a accès à l'ensemble des informations concernant sa santé détenues, à quelque titre que ce soit, par des professionnels et établissements de santé, qui sont formalisées ou ont fait l'objet d'échanges écrits entre professionnels de santé, notamment des résultats d'examen, comptes rendus de consultation, d'intervention, d'exploration ou d'hospitalisation, des protocoles et prescriptions thérapeutiques mis en oeuvre, feuilles de surveillance, correspondances entre professionnels de santé (…). »

Toutes les informations concernant la santé du patient peuvent lui être communiquées si elles ont été formalisées ou ont fait l’objet d’échanges entre praticiens. Il s’agit notamment :

  • des résultats d'examen,
  • des comptes rendus de consultation,
  • des comptes rendus d'intervention,
  • des comptes rendus d'exploration,
  • des comptes rendus d’hospitalisation,
  • des protocoles,
  • des prescriptions thérapeutiques,
  • des feuilles de surveillance,
  • des correspondances entre praticiens etc.

Toutefois, il ne s’agit pas d’une liste exhaustive.

En effet, depuis la loi du 31 janvier 2007, n° 2007-131, les informations contenues dans le dossier médical peuvent être communiquées au patient et ce, même si elles n’ont pas contribué à l'élaboration et au suivi d’un diagnostic et d’un traitement ou d’une action de prévention.

Dès lors, toutes les informations contenues dans le dossier médical semblent devoir être communiquées au patient qui en fait la demande.

En toute logique, les notes personnelles prises par le praticien sur le comportement de son patient lors des consultations ou sur son état d’anxiété suite à l’annonce d’un diagnostic doivent donc également être communiquées au patient qui sollicite la communication de son dossier médical.

Cette loi de 2007 est en contradiction avec le décret du 7 mai 2012 selon lequel les notes personnelles du praticien ne sont ni transmissibles ni accessibles.

Toutefois, il est important de souligner que ce décret a une force juridique inférieure à celle de la loi.

Dès lors, compte tenu de l’incertitude juridique régnant dans ce domaine, il est conseillé au praticien d’éviter de rédiger des notes personnelles ou à tout le moins de les individualiser du reste du dossier médical.

2. Exceptions

Selon l’article L. 1111-7 du code de la santé publique, « toute personne a accès à l'ensemble des informations concernant sa santé (…), à l'exception des informations mentionnant qu'elles ont été recueillies auprès de tiers n'intervenant pas dans la prise en charge thérapeutique ou concernant un tel tiers »

Les informations sur les tiers ou recueillies auprès des tiers ne sont donc pas communicables au patient.

a- Les informations sur les tiers

Les informations recueillies par le praticien sur les tiers ne doivent pas être communiquées au patient qui sollicite la communication de son dossier médical.

Tel est notamment le cas du praticien qui constate l’état de perversité du père ou de la mère d’un patient mineur et qui l’inscrit dans le dossier médical. Ces informations ne doivent pas être communiquées car elle ne concerne pas directement le patient mineur.

En outre, un patient qui sollicite la communication des éléments de son dossier médical relatifs à sa naissance ne pourra pas obtenir communication des éléments relatifs à l’accouchement de sa mère.

b- Les informations recueillies auprès des tiers

Les informations recueillies par le praticien auprès des tiers, tels que l’employeur ou la famille du patient, ne doivent pas être communiquées au patient qui sollicite la communication de son dossier médical.

Par exemple, un patient hospitalisé en hôpital psychiatrique, qui prendrait connaissance de son entier dossier médical, pourrait éventuellement savoir que c’est sa famille qui est à l’origine de son hospitalisation alors que celle-ci souhaitait le taire.

III – FORMALISME DE LA DEMANDE DE COMMUNICATION DU DOSSIER

1 – Principe

Aucun formalisme n’est exigé concernant la demande de communication du dossier médical par le patient, cette demande pouvant en effet être orale ou écrite, par lettre simple ou lettre recommandée.

Il est conseillé au praticien de mémoriser par écrit la date de la demande du patient et ce, afin de se défendre en cas de litige judiciaire avec celui-ci qui reprocherait un retard ou un refus de communication du dossier médical.

En effet, la date de la demande du patient correspond au point de départ du délai légal dans lequel le praticien doit délivrer ou refuser de délivrer le dossier médical.

2 – Les modes d’accès et de transmission du dossier médical

Le dossier médical peut être consulté gratuitement sur place par le patient, soit, directement soit, par l’intermédiaire d’un médecin.

Une copie du dossier médical peut également être envoyée par le praticien par voie postale aux frais du patient.

Lorsque le patient sollicite la communication de son dossier médical par voie postale, le praticien doit toujours informer le patient du coût de la reproduction, des frais postaux et de son impossibilité de reproduire telles ou telles pièces médicales.

Lorsque le patient sollicite l’accès à son dossier médical sans en préciser le mode, le médecin informe alors son patient qu’à défaut de précision de sa part, il choisira tel ou tel mode de communication.

Lorsqu’il s’agit d’un dossier médical papier, le praticien doit toujours communiquer une copie, le dossier original devant rester à son cabinet.

3 – Le délai de transmission du dossier médical

Selon l’article L. 1111-7 aliéna 2 du code de la santé publique, toute personne « peut accéder à ces informations directement ou par l'intermédiaire d'un médecin qu'elle désigne et en obtenir communication, (…) au plus tard dans les huit jours suivant sa demande et au plus tôt après qu'un délai de réflexion de quarante-huit heures aura été observé. Ce délai est porté à deux mois lorsque les informations médicales datent de plus de cinq ans ou lorsque la commission départementale des soins psychiatriques est saisie (…) ».

Le dossier médical doit donc être communiqué au patient par le praticien ou par l’établissement de santé dans les huit jours suivant la demande de ce dernier, mais après un délai de réflexion de quarante-huit heures.

Lorsque les informations médicales date de plus de cinq ans, le praticien ou l’établissement de santé a un délai de deux mois pour les communiquer au patient.

Il en est de même lorsque la commission départementale des soins psychiatriques est saisie.

Saisine de la Commission départementale des soins psychiatriques : Lorsqu’un patient hospitalisé en psychiatrie sans son consentement sollicite la communication de son dossier médical, le responsable de l'établissement, qui estime que la situation du malade l'exige, informe l'intéressé que l'accès à son dossier ne peut avoir lieu qu'en présence d'un médecin. En cas de refus du patient de désigner un médecin accompagnateur, le détenteur des informations saisit alors la commission départementale des hospitalisations psychiatrique, dont l'avis s'impose au demandeur et au détenteur des informations.

IV – CONSERVATION DU DOSSIER MEDICAL

1 – Les débiteurs de la conservation

a – La conservation par l’établissement de santé

Selon l’article R. 1112-7 du code de la santé publique, le dossier médical est conservé sous la responsabilité de l’établissement de santé lorsque le patient y a subi des soins externes ou y a été hospitalisé et ce, pendant une durée de 20 ans à compter du dernier séjour ou de la dernière consultation externe du patient dans l’établissement.

Lorsque la durée de conservation d'un dossier médical s'achève avant le vingt-huitième anniversaire de son titulaire, alors la conservation du dossier est prorogée jusqu'à cette date.

Dans tous les cas, si la personne titulaire du dossier médical décède moins de dix ans après son dernier passage dans l'établissement, le dossier est conservé pendant une durée de dix ans à compter de la date du décès.

Ces délais sont suspendus par l'introduction de tout recours gracieux ou contentieux tendant à mettre en cause la responsabilité médicale de l'établissement de santé ou de professionnels de santé à raison de leurs interventions au sein de l'établissement.

A l'issue du délai de conservation, le dossier médical peut être éliminé. La décision d'élimination est prise par le directeur de l'établissement après avis du médecin responsable de l'information médicale.

Dans les établissements publics de santé et les établissements de santé privés participant à l'exécution du service public hospitalier, cette élimination est en outre subordonnée au visa de l'administration des archives, qui détermine ceux de ces dossiers dont elle entend assurer la conservation indéfinie pour des raisons d'intérêt scientifique, statistique ou historique.

b - La conservation par le praticien libéral

La fiche personnelle dressée pour chaque patient par le praticien libéral exerçant en cabinet de ville ou au sein de l’établissement de santé reste sous sa propre responsabilité.

Toutefois, aucun texte légal ne fixe pour les médecins libéraux, la durée de conservation de leurs archives.

Il semble logique pour le praticien de conserver les dossiers médicaux pendant toute la durée de la prescription de l’action en responsabilité, laquelle est de 10 ans à compter de la consolidation du dommage.

Toutefois, le point de départ de ce délai, à savoir la consolidation du dommage, fait planer une incertitude sur la durée de conservation des dossiers médicaux. En effet, l’état de santé du patient peut s’aggraver ce qui repousse alors la date de la consolidation et donc la durée de la prescription de l’action en responsabilité et par voie de conséquence la durée de conservation des dossiers médicaux par le praticien.

En conséquence, il est conseillé au praticien de conserver le dossier médical pendant 30 ans pour un patient majeur et pendant 48 ans pour un patient mineur.

2 – Quelques exceptions au délai de conservation

a – Les clichés argentiques

La détérioration d’un cliché argentique avant l’expiration du délai de conservation du dossier médical ne peut pas être reproché à un praticien ou à un établissement de santé dans la mesure où la durée de conservation de ces clichés n’est que de 10 ans.

b - Les actes transfusionnels

La mention des actes transfusionnels pratiqués et, le cas échéant, la copie de la fiche d’incident transfusionnel figurant dans le dossier médical doivent y être conservées pendant une durée de trente ans conformément aux termes de l’article 4 de la directive européenne précitée du 30 septembre 2005.


3 – La conservation du dossier médical suite à la cessation d’activité du praticien

a - La cessation d’activité temporaire

Lorsque le praticien cesse temporairement son activité professionnelle, il doit transmettre les dossiers médicaux de ses patients à son remplaçant.

b - La cessation d’activité définitive

Lorsque le praticien cesse définitivement son activité, les dossiers médicaux sont mis à la disposition du successeur.

A défaut de successeur, les dossiers sont transférés au médecin nouvellement choisi par le patient pour poursuivre les soins.

En cas de décès du praticien, les dossiers médicaux sont remis soit au successeur soit aux ayants droit du praticien décédé, lesquels peuvent préférer les stocker par une société d’archivage.

V – LES SANCTIONS DU DEFAUT DE COMMUNICATION DU DOSSIER

Aucune sanction légale n’est prévue à l’encontre de l’établissement ou du praticien libéral qui refuse ou qui n’a plus la possibilité de communiquer le dossier médical au patient qui en fait la demande.

Toutefois, malgré cette carence législative, les Juges n’hésitent pas à sanctionner les praticiens ou établissements ayant perdu le dossier médical de leur patient ou ayant refusé injustement de leur en communiquer une copie.

1 – L’impossibilité pour le praticien de communiquer le dossier médical

Les tribunaux n’hésitent pas à sanctionner le praticien qui est dans l’impossibilité de communiquer à son patient son dossier médical.



Ce praticien est sanctionné soit, du fait du préjudice moral né de la seule violation du droit à avoir accès à son dossier médical soit, parce que cette violation a eu pour conséquence de priver le patient d’une chance de gagner son procès contre le praticien à qui il reproche une faute de prise en charge.

Jugement du Tribunal de Grande Instance de MARSEILLES du 7 avril 2011

Le tribunal a jugé que « la perte de ce dossier constitue un manquement à l'article R. 4127-45 du code de la santé publique » et que cette faute « est en relation directe avec le préjudice subi par la patiente, qui a ainsi été privée de la chance d'établir de façon certaine la responsabilité du médecin ».

Le praticien a été condamné à verser à sa patiente 2.000,00 euros de dommages-intérêts pour avoir égaré « malencontreusement et bien regrettablement » son dossier médical. 


Dans le cadre d'un litige avec un patient, la perte du dossier médical est souvent considérée comme suspecte par les Tribunaux qui estiment que le praticien a cherché à dissimuler des éléments qui pourraient lui être défavorables.

Arrêt de la Cour administrative d’appel de LYON du 23 mars 2010, n° 07LY01554 : La Cour administrative d’appel a jugé que « le requérant a subi un préjudice moral certain du fait de la non communication, à laquelle il avait droit, de ses dossiers médicaux (…) ». Le Centre hospitalier a été condamné à verser à ce patient 2.000,00 euros en réparation de son préjudice moral.

La destruction accidentelle, même si elle présente les caractères de la force majeure (incendie, dégâts des eaux) n’empêchera pas le praticien d’être jugé responsable de cette destruction.

2 – Le refus du praticien de communiquer le dossier médical

Jugement du Tribunal de Grande Instance du 14 septembre 2012 : Le tribunal a condamné un médecin à verser au patient, qui sollicitait la communication de son dossier médical, une somme de 500,00 euros et ce, pour résistance abusive du fait du refus injustifié du praticien concernant la communication dudit dossier.

CONCLUSION

Le patient, ses représentants légaux, son tuteur ou ses ayants droit peuvent avoir à tout moment besoin d’accéder au dossier médical et notamment en cas d’action judiciaire qu’il souhaite intenter à l’encontre d’un praticien et/ou d’un établissement de santé à qui il reproche un défaut de prise en charge.

Dans cette hypothèse, le dossier médical devient alors une véritable arme de défense.

Il est donc important que le praticien et/ou l’établissement de santé tienne pour chaque patient un dossier médical parfaitement clair et lisible et qu’il s’assure de leur conservation pendant le délai qui leur est imposé ou conseillé.

vendredi 8 février 2013

MAJEUR PROTEGE SOUS TUTELLE ET CONSENTEMENT A UNE INTERVENTION CHIRURGICALE

L'information sur l'état de santé

En matière de tutelle, c’est le tuteur qui gère les intérêts du majeur incapable juridiquement.

Si le jugement qui instaure la tutelle ne prévoit qu’une tutelle aux biens, alors le patient demeure autonome quant à sa santé et le tuteur n’a pas lieu d’être informé de l’état de santé de son protégé.

A contrario, si la tutelle touche également la personne de l’incapable, son tuteur doit être informé de manière exhaustive sur l’état de santé de celui qu’il protège. Le tuteur est donc dans ce cas habilité à obtenir communication des informations médicales concernant la personne protégée, le secret médical ne lui étant pas opposaable.

En effet, l'accès aux informations relatives à la santé d'une personne et détenues par un professionnel de santé, un établissement de santé ou un hébergeur agréé, peut être demandé par la personne concernée, son ayant droit en cas de décès de cette personne, la personne ayant l'autorité parentale, le tuteur ou, le cas échéant, par le médecin qu'une de ces personnes a désigné comme intermédiaire (Cf. Article R.1111-1, 1er alinéa du Code de la Santé publique).

Les médecins doivent être attentifs à ne communiquer aux tuteurs que les éléments nécessaires, pertinents et non excessifs en rapport avec l'objectif de leur demande (traitement médical, intervention chirurgicale etc …). Toutefois, l’information due au tuteur ne doit pas empêcher l’information du patient lui-même par le praticien, de manière adaptée à ses facultés intellectuelles (Cf. article L. 1111-2 du code de la santé publique). Cette règle s’applique également lorsque doit être envisagée une intervention chirurgicale.

Le consentement à un acte médical et/ou chirurgical

En effet, aucun acte médical ni aucun traitement ne peut être pratiqué sans le consentement libre et éclairé de la personne, majeur protégé ou non, et ce consentement peut être retiré à tout moment (Cf. Articles L. 1111-2 et -4 du CSP).

Compte tenu de la difficulté à apprécier le degré de maturité du majeur protégé, le consentement du tuteur doit également être sollicité (cf. article L.1111-4 du CSP).

Dans l’hypothèse d’une intervention chirurgicale, ce consentement doit être écrit.

Si le patient sous tutelle ne peut exprimer son avis ou s’il refuse l’intervention, le tuteur doit solliciter une autorisation du juge des tutelles chaque fois que la décision présente un risque sérieux d’atteinte à l’intégrité corporelle de la personne protégée (Charte du patient hospitalisé).

Si l’état de santé du patient ne permet pas d’attendre cette autorisation, le chirurgien apprécie l’urgence et le caractère indispensable de l’intervention et peut décider d’opérer. Il est alors préférable que le praticien d’une part, mentionne par écrit les comptes rendus de ses décisions et de ses choix, qu’il précise les circonstances dans lesquelles le tuteur a été sollicité et a refusé les soins et d’autre part, qu’il sollicite l’avis d’un confrère. La traçabilité des démarches entreprises permettra au chirurgien de se protéger en cas de recours.

En l’absence de toute urgence, aucun traitement ne peut être délivré au patient.

Le signalement aux autorités

Enfin, si le praticien estime que le refus de soins du tuteur est assimilable à des sévices, il peut informer le procureur de la République et le juge des tutelles afin que toutes les mesures de protection soient prises et adresser le patient à une assistante sociale afin qu’un rapport médico-social puisse être joint au signalement (Cf. article 226-14 du Code pénal).

L’absence de signalement peut constituer un délit de non assistance à personne en danger dès lors qu’il existe un risque imminent que le patient subisse des sévisses (Cf. Article 223-6 du Code pénal).