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lundi 18 mai 2015

LA LEGISLATION SUR LA PRISE EN CHARGE MEDICALE DE LA FIN DE VIE ET LES AMELIORATIONS ATTENDUES

INTRODUCTION

Le débat sur l’euthanasie a été relancé en France, au début des années 2000 à l’occasion du cas « Vincent Humbert ».

Une « mission d’évaluation sur l’accompagnement de la fin de vie » a ainsi été créée au sein de l’Assemblée nationale sous la présidence du député Jean LEONETTI et une loi a été promulguée dans ses suites, le 22 avril 2005 : « Loi LEONETTI », relative aux droits des malades et à la fin de vie.

Cependant, afin d’améliorer les dispositions prises dix ans plus tôt, une nouvelle proposition de loi a été adoptée en première lecture par l’Assemblée Nationale, le 17 mars 2015.

Elle est actuellement soumise à l’examen du Sénat.

Mais quelles sont précisément les améliorations envisagées ?

Il convient préalablement de faire un rappel concernant le contenu de la loi LEONETTI de 2005.

I – LA LOI DU 22 AVRIL 2005

La Loi LEONETTI précise les droits des patients et organise les pratiques à mettre en œuvre quand se pose la question de la fin de vie.

Mais quels sont précisément les grands principes de cette loi ?

Les grands principes de la loi LEONETTI de 2005 :

  • Instauration des directives anticipées,
  • Interdiction de l’acharnement thérapeutique et de l’obstination déraisonnable,
  • Possibilité d’arrêter les soins ou traitements mettant en danger la vie,
  • Soulagement des souffrances du malade en fin de vie,

1) L’instauration des directives anticipées

L’article L. 1111-11 du code de la santé publique dispose que toute personne majeure peut rédiger des directives anticipées pour le cas où elle serait un jour hors d'état d'exprimer sa volonté.

Ces directives sont révocables à tout moment. Celles-ci s'entendent d'un document écrit, daté et signé par leur auteur dûment identifié par l'indication de ses nom, prénom, date et lieu de naissance. Elles indiquent les souhaits de la personne relatifs à sa fin de vie concernant les conditions de la limitation ou l'arrêt de traitement. Toutefois lorsque l'auteur de ces directives, bien qu'en état d'exprimer sa volonté, est dans l'impossibilité d'écrire et de signer lui-même le document, il peut demander à deux témoins, dont la personne de confiance lorsqu'elle est désignée, d'attester que le document qu'il n'a pu rédiger lui-même est l'expression de sa volonté libre et éclairée. Dans cette hypothèse, ces témoins indiquent leur nom et qualité et leur attestation est jointe aux directives anticipées. En tout état de cause, à condition qu'elles aient été établies moins de trois ans avant l'état d'inconscience de la personne, le médecin doit en tenir compte pour toute décision d'investigation, d'intervention ou de traitement la concernant. Celles-ci n’ont toutefois aucune valeur contraignante. Les directives anticipées peuvent être soit conservées dans le dossier de la personne constitué par un médecin de ville, qu'il s'agisse du médecin traitant ou d'un autre médecin choisi par elle, soit en cas d'hospitalisation, dans le dossier médical de l’établissement de santé. Elles peuvent également être conservées par leur auteur ou confiées par celui-ci à la personne de confiance ou, à défaut, à un membre de sa famille ou à un proche.

2) L’interdiction de l’acharnement thérapeutique

Selon l’article R. 4127-37 du code de la santé publique, le médecin doit s'efforcer, en toutes circonstances, de soulager les souffrances du malade par des moyens appropriés à son état et l'assister moralement. Il doit s'abstenir de toute obstination déraisonnable dans les investigations ou la thérapeutique et peut renoncer à entreprendre ou poursuivre des traitements qui apparaissent inutiles, disproportionnés ou qui n'ont d'autre objet ou effet que le maintien artificiel de la vie. Cette interdiction est valable que le patient soit en état ou hors d’état d’exprimer sa volonté. Sont donc ainsi distingués dans le code de la santé publique, les soins déraisonnables dont le médecin doit se dispenser, des soins disproportionnés auxquels il peut renoncer. Cette définition relève davantage de la déontologie que d’une définition juridique. Dans ces hypothèses de dispense ou de renoncement aux soins, le médecin est autorisé à dispenser des soins palliatifs, en respectant une procédure collégiale définie ci-dessous.

3) L’arrêt des soins

Deux hypothèses doivent être distinguées :

  • le patient en état d’exprimer sa volonté
  • le patient hors d’état d’exprimer sa volonté

a- Le patient en état d’exprimer sa volonté et le refus de soins du patient

Selon l’article L. 1111-4 du code de la santé publique, toute personne prend, avec le professionnel de santé et compte tenu des informations et des préconisations qu'il lui fournit, les décisions concernant sa santé. Le médecin doit respecter la volonté de la personne après l'avoir informée des conséquences de ses choix. En effet, aucun acte médical ni aucun traitement ne peut être pratiqué sans le consentement libre et éclairé de la personne et ce consentement peut être retiré à tout moment. Si la volonté de la personne de refuser ou d'interrompre tout traitement met sa vie en danger, le médecin doit tout mettre en œuvre pour la convaincre d'accepter les soins indispensables. Dans tous les cas, le malade doit réitérer sa décision après un délai raisonnable. Celle-ci est inscrite dans son dossier médical.

b- Le patient hors d’état d’exprimer sa volonté et la décision médicale d’arrêt ou de limitation des soins prise par le médecin

Le principe :

Selon l’article L. 1111-4 du code de la santé publique, lorsque la personne est hors d'état d'exprimer sa volonté, la limitation ou l'arrêt de traitement susceptible de mettre sa vie en danger ne peut être réalisé sans avoir respecté la procédure collégiale définie ci-dessous et sans que la personne de confiance ou la famille ou, à défaut, un de ses proches et, le cas échéant, les directives anticipées de la personne, aient été consultés.

La décision motivée de limitation ou d'arrêt de traitement est inscrite dans le dossier médical.

Dans cette hypothèse, le médecin délivre des soins palliatifs. Article L. 1110-10 du code de la santé publique : Définition de la notion de soins palliatifs « Les soins palliatifs sont des soins actifs et continus pratiqués par une équipe interdisciplinaire en institution ou à domicile. Ils visent à soulager la douleur, à apaiser la souffrance psychique, à sauvegarder la dignité de la personne malade et à soutenir son entourage ».

En pratique :

La décision de limitation ou d'arrêt de traitement est prise après concertation avec l'équipe de soins si elle existe et sur l'avis motivé d'au moins un médecin, appelé en qualité de consultant, distinct de celui prenant en charge médicalement le patient concerné par cette décision. Il ne doit exister aucun lien de nature hiérarchique entre le médecin en charge du patient et le consultant. L'avis motivé d'un deuxième consultant est demandé par ces médecins si l'un d'eux l'estime utile. La décision de limitation ou d'arrêt de traitement prend en compte les souhaits que le patient aurait antérieurement exprimés, en particulier dans des directives anticipées, s'il en a rédigées, l'avis de la personne de confiance qu'il aurait désignée ainsi que celui de la famille ou, à défaut, celui d'un de ses proches. Le médecin doit donc prendre connaissance de l’ensemble des directives anticipées et/ou avis de la personne de confiance, de la famille ou des proches mais la décision finale lui revient. Lorsque la décision de limitation ou d'arrêt de traitement concerne un mineur ou un majeur protégé, le médecin recueille en outre, selon les cas, l'avis des titulaires de l'autorité parentale ou du tuteur, hormis les situations où l'urgence rend impossible cette consultation. Aussi, dans tous les cas, la décision de limitation ou d'arrêt de traitement doit être motivée. Pour ce faire, les avis recueillis, la nature et le sens des concertations qui ont eu lieu au sein de l'équipe de soins ainsi que les motifs de la décision sont inscrits dans le dossier du patient. Dans l’hypothèse où le médecin irait contre la volonté de la personne de confiance, de la famille ou des proches ou contre le sens des directives anticipées prises par le patient, le médecin décisionnaire devra informer ces derniers de la nature et des motifs de la décision de limitation ou d'arrêt de traitement. Lorsqu'une limitation ou un arrêt de traitement a été décidé, le médecin met en œuvre les traitements, notamment antalgiques et sédatifs et ce, même si la souffrance du patient ne peut pas être évaluée du fait de son état cérébral.

En conséquence, il est incontestable que la loi du 22 avril 2005 n’instaure pas un droit à mourir. Elle autorise le médecin à prescrire certains traitements dont l’effet indirect peut être d’entraîner la mort ou d’accélérer sa survenance.

II – LA PROPOSITION DE LOI DU 17 MARS 2015

Le 17 mars 2015, les députés ont adopté en première lecture à une écrasante majorité le texte de loi sur la fin de vie. Un texte qui repose sur deux principes forts :

  • les directives anticipées du patient
  • le droit à la sédation profonde.

En effet, dans l’hypothèse où cette loi viendrait à être promulguée, elle n’autoriserait ni l’euthanasie ni le suicide assisté, mais instaurerait un droit à une sédation « profonde et continue » jusqu’au décès pour les malades en phase terminale et rendrait les directives anticipées contraignantes.

En sus de ces deux points forts, le rôle de la personne de confiance sera renforcé.

Et le médecin dont le patient souhaiterait arrêter des soins et traitements n’aurait plus à tenter de convaincre ce dernier de se soigner.

La volonté du patient serait alors renforcée encore un peu plus.

1) Le caractère contraignant des directives anticipées

Rendre les directives anticipées contraignantes serait une évolution majeure. En effet, aujourd’hui elles ne sont valables que trois ans et n’ont aucun caractère contraignant pour le médecin qui doit en prendre certes connaissance mais qui reste libre de les suivre ou non. Dans le nouveau texte, ces directives pourraient désormais s'imposer au médecin, « sauf en cas d'urgence vitale pendant le temps nécessaire à une évaluation complète de la situation ». Elles prévaudraient d’ailleurs sur l’avis de la personne de confiance, contrairement à aujourd’hui où cet avis « prime ». Toutefois, dans l’hypothèse où le médecin les estimerait manifestement inappropriées, il serait alors dans l’obligation de solliciter un avis médical avant de prendre sa décision. Elles seraient également sans limite de validité mais révisables et révocables à tout moment. La version initiale de la proposition de loi prévoyait que leur existence serait signalée sur la carte vitale, mais l'Assemblée Nationale a remplacé cette disposition par un amendement du gouvernement prévoyant que « les directives anticipées sont notamment conservées sur un registre national faisant l'objet d'un traitement automatisé ».

Il s’agirait également d’une importante avancée en ce qu’elles sont aujourd’hui rédigées sur papier libre. Cette volonté d’imposer un modèle officiel pourrait permettre d’éviter les imprécisions compliquant la tâche des médecins.

2) Le droit à une sédation profonde et continue jusqu’au décès

La loi LEONETTI de 2005 autorise la limitation ou l’arrêt des traitements et le soulagement de la douleur, sans que ne soit expressément mentionné les pratiques utilisées pour le faire, à savoir l’administration de substance ayant le double effet de soulager la douleur et de réduire la durée de la vie. Pourtant les unités de soins palliatifs y ont recours depuis quinze ans. C’est dans cette optique d’autorisation de pratiques déjà existantes que la loi du 17 mars 2015 a notamment été proposée par l’Assemblée Nationale afin d’instaurer le droit à « une sédation profonde et continue ».

Cette sédation aurait vocation non plus à seulement soulager la douleur mais également à assurer au patient « une fin de vie digne et apaisée ». Cette notion d’apaisement n’est pas présente dans le texte actuellement en vigueur de 2005. Cela montre une réelle volonté d’accroitre le soulagement de la souffrance des patients en agissant directement sur leur état d’inconscience. Concrètement, ce nouveau droit permettrait de proposer à certains patients atteints de maladies graves et incurables un traitement sédatif provoquant une altération de la conscience maintenue jusqu'au décès associée à une analgésie afin d’endormir et d’apaiser le patient jusqu'à son décès, sans le réveiller. Cette sédation pourrait s'appliquer dans deux cas très particuliers de patients conscients, et qui en feraient la demande.

  • les patients atteints d'une affection grave et incurable dont le pronostic vital est engagé à court terme et qui présentent une souffrance qui ne peut pas être soulagée ;
  • les patients touchés par une affection grave et incurable, qui demandent l'arrêt de leur traitement alors même que cette décision risque d’entraîner leur décès à très court terme.

En outre, de la même manière que depuis 2005, dans l’hypothèse où la personne en fin de vie ne serait pas en état d'exprimer sa volonté, mais qu'elle se trouverait en situation d'acharnement thérapeutique, l'utilisation de la sédation profonde pourrait être requise. Dans ces cas, la décision d'arrêter les traitements serait prise selon la procédure collégiale. Enfin, d’autres avancées non négligeables ont été envisagées. L'hydratation et l'alimentation serait désormais considérées comme un traitement de « maintien en vie » qui pourraient dès lors être arrêtées en même temps que l’administration de la sédation profonde par le médecin. En outre, cette sédation profonde serait désormais autorisée et donc pratiquée dans tous les établissements de santé ou au domicile du patient et non plus uniquement dans les centres et/ou services de soins palliatifs.

3) Le renforcement du rôle de la personne de confiance

Actuellement, en l'absence de directives anticipées, la volonté de la personne qui ne peut plus s'exprimer peut être relayée par une personne de confiance. Encore faut-il que le patient en fin de vie ait expressément désigné par écrit cette personne confiance, dont le témoignage prévaut aujourd’hui sur tout autre témoignage. Tout comme pour les directives anticipées, cette désignation est révocable à tout moment. Mais si aucune personne de confiance n'a été désignée, le médecin se tourne vers la famille ou les proches pour rechercher "la volonté" de la personne.

Le rôle de la personne de confiance est déjà très important aujourd’hui pour soutenir le malade dans la prise de décision concernant sa santé.

En effet, si le malade le souhaite, la personne de confiance peut l'accompagner dans ses démarches et assister aux entretiens médicaux afin de l'aider dans ses décisions.

Toutefois, par cette proposition de loi, ce rôle serait encore davantage renforcé et ce, en échos à cette volonté de renforcer la valeur et le poids des directives anticipées.

En effet, la personne de confiance pourrait notamment demander, au médecin en charge du patient, les informations nécessaires contenues dans le dossier médical appartenant à ce dernier afin de vérifier si la situation médicale de la personne concernée et les décisions prises par le médecin correspondent aux conditions exprimées dans les directives anticipées.

CONCLUSION

Compte tenu de tout ce qui précède, il est incontestable que la proposition de loi adoptée en première lecture par l’Assemblée Nationale le 17 mars dernier n’a pas vocation à légiférer sur l’euthanasie mais à améliorer davantage le sort des malades en fin de vie.

Il ne s’agit pas en effet d’aider le patient concerné à mourir par le biais d’une pratique d’euthanasie mais de lui assurer une fin de vie digne et apaisée en l’accompagnant jusqu’à ses derniers instants par le biais de soins et mesures de plus en plus appropriés et adaptés.

Nous n’avons donc plus qu’à attendre la décision que le Sénat prendra sur cette proposition de loi.

mardi 6 janvier 2015

INFORMATION ET CONSENTEMENT DU PATIENT

INTRODUCTION

Toute personne a le droit d'être informée sur son état de santé (Cf. Article L. 1111-2 du code de la santé publique).

Cette information porte notamment sur les différentes investigations, traitements ou actions de prévention qui sont proposés, leur utilité, leur urgence éventuelle, leurs conséquences, les risques fréquents ou graves normalement prévisibles qu'ils comportent ainsi que sur les autres solutions possibles et sur les conséquences prévisibles en cas de refus.

Cette information est nécessaire car elle permet au patient de consentir librement et de manière éclairée à un acte de soins.

En cas de violation de cette obligation d’information, le Praticien pourra être sanctionné et le patient indemnisé.

CREANCIER ET DEBITEUR DE L’INFORMATION

1 - Le débiteur de l’information

L’obligation d’information est mise à la charge de tout professionnel de santé, dans le cadre de ses compétences et dans le respect des règles de santé qui lui sont applicables. Cette obligation pèse donc tant sur le prescripteur de l’acte que sur celui qui pratique l’acte.

2 - Le créancier de l’information

a- Le patient en état d’exprimer sa volonté

Le Praticien doit informer directement son patient lorsqu’il est en état d’exprimer sa volonté.

b- Le patient hors d’état d’exprimer sa volonté

L’article L. 1111-4 du code de la santé publique dispose qu’« aucune intervention ou investigation ne peut être réalisée, sauf urgence ou impossibilité, sans que la personne de confiance ou la famille, ou à défaut, un de ses proches ait été consulté ».

Lorsque le Patient est hors d’état d’exprimer sa volonté, le Praticien doit informer prioritairement la personne de confiance, puis la famille et à défaut les proches. L’avis de la personne de confiance est prioritaire et supérieur à celui de la famille ou des proches. Cet avis doit systématiquement être recherché par le Praticien qui conserve toutefois sa liberté de décision.

Définition et rôle de la personne de confiance : La personne de confiance, qui peut être un parent, un proche ou le médecin-traitant, doit être majeure. Elle sera consultée au cas où le patient qui l’a désignée serait hors d'état d'exprimer sa volonté et de recevoir l'information nécessaire à cette fin. Cette désignation est faite par écrit. Elle est révocable à tout moment. Si le malade le souhaite, la personne de confiance peut l'accompagner dans ses démarches et l’assister aux entretiens médicaux afin de l'aider dans ses décisions. Lors de toute hospitalisation dans un établissement de santé, il est proposé au malade de désigner une personne de confiance. Cette désignation est valable pour la durée de l'hospitalisation. En dehors de toute hospitalisation, il est également possible d’inscrire, dans son dossier médical, le nom de la personne de confiance à contacter, le cas échéant.

c- Le patient en fin de vie, hors d’état d’exprimer sa volonté

Le Praticien doit systématiquement consulter le dossier médical de son patient, lorsqu’il est en fin de vie afin de prendre connaissance des éventuelles directives anticipées qu’il a pu rédiger.

Les personnes en fin de vie sont des personnes atteintes d’une affection grave et incurable, en phase avancée ou terminale. Ces directives ont pour but de permettre au Praticien de connaître les souhaits du patient concernant la possibilité de limiter ou d’arrêter les traitements en cours.

Ces directives n’ont pas de valeur contraignante pour le médecin. Il peut y déroger s’il l’estime nécessaire au regard de la situation concrète et/ou de l’évolution des connaissances médicales.

Ces directives ne sont valables que si elles remplissent les critères suivants :

  • Le patient doit être une personne majeure ;
  • Les directives doivent être écrites par le patient lui-même, ou à défaut, en présence de deux témoins dont la personne de confiance ;
  • Le patient doit nécessairement être en état d’exprimer sa volonté au moment de la rédaction de l’acte ;
  • Elles doivent mentionner les nom, prénom, date et lieu de naissance et être datées et signées ;
  • Ces directives doivent être rédigées depuis moins de 3 ans avant la date à partir de laquelle le patient n’est plus en état d’exprimer sa volonté. Elles doivent donc être renouvelées et/ou modifiées tous les 3 ans. Elles sont également révocables à tout moment.

LE CHAMP DE L’INFORMATION

L’information doit porter sur :

  • l’état de santé,
  • les investigations, traitements ou actions de prévention proposés,
  • leur utilité, leur étendue, leur urgence éventuelle et leurs conséquences,
  • les risques fréquents ou graves normalement prévisibles,
  • les alternatives thérapeutiques,
  • les conséquences prévisibles en cas de refus de soins,
  • le coût de l’acte médical et ses conditions de remboursements par la sécurité sociale.

L’information sur les risques avant 2002 :

L’information devait porter sur les risques seulement prévisibles. Si un risque exceptionnel se réalisait, alors le Praticien n’engageait pas sa responsabilité, s’il avait omis d’en informer son patient.

L’information sur les risques depuis 2002 :

Le Praticien doit informer son patient des risques fréquents ou graves normalement prévisibles. Les risques fréquents peuvent ne pas être graves. Les risques graves peuvent ne pas être fréquents. Ils peuvent donc être exceptionnels tant qu’ils sont normalement prévisibles. Un risque est grave lorsqu’il peut entraîner une invalidité ou le décès du patient. Un risque esthétique peut être grave s’il provoque des répercussions psychologiques et sociales. Un risque est normalement prévisible lorsqu’il découle logiquement des antécédents du patient ou des connaissances de la science médicale au moment des soins.

Arrêt de la Cour de cassation, 1ère Chambre civile, 15 juin 2004, n° 02-12530 « Attendu que la cour d'appel, se fondant sur les rapports d'expertise, a retenu que si le risque d'allergie à l'antibiotique était connu des praticiens, sa réalisation était, dans le cas de M. X..., imprévisible en raison des examens pré-opératoires et pré-anesthésiques pratiqués et de l'absence d'antécédent allergique ; qu'elle a pu en déduire que M. Y... et Mme Z... n'avaient pas commis de faute en n'informant pas le patient de ce risque ». Un risque exceptionnel doit être regardé comme « normalement prévisible » lorsqu’il est répertorié comme représentant un cas sur 1000.

Arrêt de la Cour administrative d’appel de Lyon, 23 décembre 2010, n° 09LY01051 « ; qu'il résulte de l'instruction que le risque d'ischémie dont M. C a été victime dans les suites de l'examen coronarographique litigieux, bien qu'exceptionnel, est connu comme représentant un cas sur mille ; qu'il devait ainsi être regardé comme normalement prévisible au sens des dispositions ci-dessus ; que dès lors, contrairement à ce que soutient le centre hospitalier, ce risque entrait dans l'obligation d'information posée par ces mêmes dispositions;

LES CONDITIONS DE VALIDITE DE L’INFORMATION

L’information doit être donnée prioritairement à l’oral, en amont des soins et au cours d’un entretien individuel. Elle doit être renouvelée à chaque étape de la prise en charge. Elle doit être donnée dans les quinze (15) jours suivant la découverte d’une complication. L’information doit être claire et appropriée. Elle est claire lorsqu’elle est adaptée à la capacité de compréhension du patient. Elle est appropriée lorsqu’elle est pertinente eu égard à l’état de santé du patient (pathologie & traitements).

L'information peut également être écrite, ce qui simplifie sa preuve.

PREUVE DE LA DELIVRANCE DE L’INFORMATION

La charge de la preuve de la délivrance de l’information pèse sur le Praticien.

En cas de contentieux judiciaire, les juges se fondent sur un faisceau d’indices :

  • Le nombre de consultation(s) préalable(s) avec le patient;
  • Les interventions déjà subies antérieurement ;
  • Le délai de réflexion après remise d’un document écrit tel des fiches techniques ;
  • L’attestation de consentement signé ;
  • Les schémas réalisés par le médecin lors de l’entretien individuel ;
  • Les examens complémentaires prescrits ;
  • L’avis d’éventuels consultants extérieurs ;
  • Les notes personnelles du Praticien écrites généralement pendant la consultation ou juste après ;
  • Les lettres des confrères ;
  • Les fiches techniques ;

Les feuilles d’information dites « fiches techniques » fournies par le Praticien doivent contenir des informations détaillées, adaptées à l’état de santé du patient, et être accompagnées d’explications orales de la part du praticien. Elles ne doivent pas être stéréotypées.

Les fiches techniques sont utiles comme « commencement de preuve » pour prouver que le Praticien a rempli son obligation d’information, mais elles ne sont pas suffisantes. Elles ne peuvent servir de décharge de responsabilité. Il n’est donc pas nécessaire que le Praticien les fasse signer à son patient. Il est recommandé de les donner à son patient, pour qu’il puisse en discuter avec ses proches. Une copie doit toutefois être conservée dans le dossier médical avec les schémas et les notes personnelles. Le Praticien doit toujours laisser un délai de réflexion à son patient avant la réalisation de un acte médical.

LE CONSENTEMENT

Le Praticien doit informer son patient sur son état de santé et sur les soins envisageables afin d’obtenir un consentement libre et éclairé de celui-ci. Le consentement du patient peut être oral ou écrit. Toutefois, le consentement est obligatoirement écrit dans certains cas et notamment en cas de recherches biomédicales ou d’examens des caractéristiques génétiques. Le consentement peut être retiré à tout moment. Dans tous les cas, le médecin doit respecter la volonté de la personne après l'avoir informée des conséquences de ses choix. Si la volonté de la personne de refuser ou d'interrompre tout traitement met sa vie en danger, le médecin doit tout mettre en œuvre pour la convaincre d'accepter les soins indispensables. Dans ce cas, le malade doit réitérer sa décision après un délai raisonnable, laquelle est inscrite dans son dossier médical. Le médecin sauvegarde alors la dignité du mourant et assure la qualité de sa fin de vie en dispensant les soins.

EXCEPTIONS A L’OBLIGATION D’INFORMATION

L’article L. 1111-4 du code de la santé publique dispose qu’« aucune intervention ou investigation ne peut être réalisée, sauf urgence ou impossibilité, sans que la personne de confiance ou la famille, ou à défaut, un de ses proches ait été consulté ».

Le Praticien peut ne pas informer son patient et donc ne pas recueillir son consentement à un acte médical, dans trois cas :

  • Refus du patient d’être informé,
  • Impossibilité d’informer le patient,
  • Urgence à intervenir médicalement,
  • L’omission du praticien dans l’intérêt du malade.

1 - Le refus du patient d’être informé

En vertu du respect de la volonté du patient, le Praticien ne peut et ne doit pas informer son patient si celui-ci refuse d’être éclairé sur son état de santé. Toutefois, s’il existe un risque de transmission/contamination pour les tiers, le Praticien doit en informer son patient et le convaincre d’en informer les tiers éventuellement concernés par ce risque de transmission / contamination.

2 - L’impossibilité du Praticien d’informer

C’est l’hypothèse du Praticien qui doit réaliser un acte de soins mais qui est dans l’impossibilité d’informer et de recueillir le consentement tant, de son patient hors d’état d’exprimer sa volonté que celui de la personne de confiance, de sa famille ou de ses proches, lesquels ne sont pas joignables. A l’issue de l’acte de soins réalisé par le Praticien, ce dernier doit toutefois informer le patient et/ou à défaut la personne de confiance, la famille ou les proches et ce, dans les meilleurs délais.

3 – L’urgence

Le Praticien doit agir dans l’urgence. Il ne peut donc prendre le temps ni d’informer ni de recueillir le consentement du patient, de la personne de confiance, de la famille ou des proches pour réaliser un acte de soins. Exemple : Lors d’un accident, si le pronostic vital de la personne est engagé, le Praticien prend en charge son patient sans l’informer des actes à réaliser et des bénéfices et risquent qui en découlent car il y a urgence à soigner.

4 – L’omission du Praticien dans l’intérêt du malade

Avant 2012

L’article R. 4127-35 du code de la santé publique disposait que « dans l'intérêt du malade et pour des raisons légitimes que le Praticien apprécie en conscience, un malade peut être tenu dans l'ignorance d'un diagnostic ou d'un pronostic graves » Le Praticien pouvait taire un diagnostic grave à son patient s’il estimait qu’il était de son intérêt de lui cacher, notamment s’il savait que le patient, dûment informé, aurait refusé le traitement. Le Praticien devait toutefois en informer la personne de confiance, la famille ou les proches.

Depuis 2012

Le décret du 7 mai 2012 a mis un terme à cette « appréciation en conscience du Praticien » dans un souci de renforcement du respect de l’obligation d’information. Désormais, le Praticien ne peut plus décider de tenir son patient dans l’ignorance d’un pronostic ou d’un diagnostic grave. Il doit l’en informer systématiquement mais avec circonspection. Toutefois, la volonté du patient étant supérieure, le Praticien devra respecter le choix de son patient qui préfère être tenu dans l’ignorance d’un diagnostic. Cette évolution réglementaire permet une meilleure protection du patient qui ne risque plus d’apprendre, au détour d’un examen complémentaire, un diagnostic grave par un autre médecin qui n’avait pas connaissance du fait que le patient était tenu dans l’ignorance de ce diagnostic.

LE MINEUR OU LE MAJEUR PROTEGE

L’article L. 1111-2 alinéa 5 du code de la santé publique dispose que « les droits des mineurs ou des majeurs sous tutelle sont exercés par les titulaires de l'autorité parentale ou par le tuteur. Les intéressés ont le droit de recevoir eux-mêmes une information et de participer à la prise de décision les concernant, d'une manière adaptée soit à leur degré de maturité s'agissant des mineurs, soit à leurs facultés de discernement s'agissant des majeurs sous tutelle ».

1 – Le mineur

a – Principe

Lorsque le patient est mineur (- de 18 ans et mineur non émancipé), les décisions sur sa santé sont prises par les personnes titulaires de l’autorité parentale. Il s’agit le plus souvent des parents. Le Praticien doit toutefois systématiquement rechercher la participation du mineur à la prise de décision, selon sa maturité et son degré de compréhension. Pour les actes bénins, seul l’un des deux parents peut donner son consentement à la réalisation d’un acte médical. Pour les actes graves, telle une atteinte à l’intégrité corporelle, l’accord des deux parents est nécessaire. En cas de conflit entre les parents sur un acte médical grave à réaliser, le Juge aux Affaires Familiales doit être saisi. Lorsque le refus de soins des parents met en danger la vie de leur enfant mineur, le Praticien peut réaliser l’acte de soins s’il y a urgence et saisir le Procureur de la République afin de dénoncer ces « sévices ».

b - Exceptions à l’information et au recueillement du consentement des titulaires de l’autorité parentale

  • Le mineur de plus de 16 ans, en rupture avec ses parents ;
  • Le mineur émancipé ;
  • L’urgence à soigner ;
  • Le refus du mineur d’informer ses parents ;

En cas de refus du mineur d’informer ses parents, le Praticien doit tenter de convaincre son patient de les informer de l’acte qu’il envisage de réaliser. S’il n’y parvient pas, le Praticien réalise l’acte médical. Le mineur doit toutefois être accompagné de la personne majeure de son choix.

2 – Le majeur protégé

a- Principe

Les décisions concernant le majeur protégé sont prises par le tuteur.

Toutefois, il existe deux types de tutelle.

  • La tutelle sur les biens du majeur ;
  • La tutelle sur la personne même du majeur ;

Lorsqu’il s’agit d’une tutelle sur les biens, le tuteur n’a aucun pouvoir de décision concernant la santé du majeur protégé qui conserve sa capacité de décision. Lorsqu’il s’agit d’une tutelle sur la personne même du majeur protégé, seul le tuteur peut prendre des décisions concernant la santé du majeur. Le Praticien doit dans cette hypothèse systématiquement rechercher la participation du majeur à la prise de décision en s’adaptant à sa capacité de discernement. Le tuteur peut décider seul des actes de soins bénins à réaliser. Pour les actes graves, qui portent atteinte à l’intégrité corporelle, le Juge des Tutelles doit donner son accord préalablement à la réalisation de l’acte. La décision du tuteur, seule, ne suffit pas.

b - Exceptions à l’information et au recueillement du consentement du tuteur ou du Juge des Tutelles

  • L’urgence
  • Lorsque le tuteur refuse de faire réaliser un acte de soins mettant ainsi en danger la vie du majeur protégé, le Praticien peut saisir le Procureur de la République pour dénoncer ces « sévices ».

SANCTIONS DU DEFAUT D’INFORMATION

1 – Le préjudice de perte de chance

Outre des sanctions disciplinaires, le Praticien ayant manqué à son obligation d’information peut être poursuivi par le patient devant les juridictions civiles afin d’obtenir réparation de son préjudice de perte de chance. Ce préjudice est défini comme la perte de chance pour le patient d’avoir pu renoncer à un acte de soins et aux risques qui en découlent, s’il avait été pleinement informé par le Praticien notamment des risques de cet acte. Le Praticien ne peut pas être sanctionné au titre du préjudice de perte de chance lorsque les soins étaient indispensables (risque de mort en l’absence de soins) et qu’il n’existait aucune alternative thérapeutique. En effet, dans ce cas, le patient n’aurait pas pu renoncer à un tel acte.

Arrêt de la Cour de cassation, 1ère Chambre civile, 11 mars 2010, n° 09-11270 « ALORS QUE, d'une part, la violation de l'obligation d'information incombant à tout professionnel de santé n'est sanctionnée qu'autant qu'il en est résulté pour le patient une perte de chance de refuser l'acte médical et d'échapper au risque qui s'est réalisé ; (…) en constatant qu'il était informé du risque de paralysie inhérent à l'exérèse d'une hernie discale et que l'indication opératoire était une réponse thérapeutique adaptée compte tenu du volume impressionnant de la hernie dont il souffrait, relevant ainsi que l'intervention était nécessaire et qu'il n'existait aucune relation causale entre le défaut d'information et le consentement du patient à l'opération envisagée, la cour d'appel a violé l'article L.1111-2 du code de la santé publique (…) ».

Le Praticien ne manque toutefois pas à son obligation d’information lorsque le risque qui se réalise n’est pas prévisible du fait de la dissimulation, par le patient, de son état de santé réel. En effet, dans cette hypothèse, le Praticien est empêché de remplir correctement son obligation d’information.

2 – Le préjudice moral d’impréparation

Depuis une évolution jurisprudentielle de 2010, la violation de l’obligation d’information par le Praticien peut également être sanctionnée au titre du préjudice moral d’impréparation. Ce préjudice correspond à l’impossibilité pour le patient de se préparer techniquement et psychologiquement à la survenue d’une complication liée à un acte médical. Dès lors, même en l’absence de perte de chance, le manquement à l’obligation d’information peut être indemnisé. Eu égard à la Jurisprudence actuelle, le préjudice moral d’impréparation semble pouvoir être réparé cumulativement avec le préjudice de perte de chance.

a-Dans le secteur privé

La Cour de cassation considère désormais que le manquement du Praticien à son obligation d’information viole le principe de la dignité humaine et qu’en conséquence, le patient qui en est victime subit un préjudice moral autonome d’impréparation. La Cour de cassation ne subordonne pas la réparation de ce préjudice moral à la réalisation effective d’une complication. Le seul fait de ne pas informer le patient suffit à lui causer un préjudice.

Arrêt de la Cour de cassation, 1ère Chambre civile, 3 juin 2010, n° 09-13591 « ALORS QUE : l'obligation du médecin d'informer son patient avant de porter atteinte à son corps est fondée sur la sauvegarde de la dignité humaine ; que le médecin qui manque à cette obligation fondamentale cause nécessairement un préjudice à son patient, fût-il uniquement moral, que le juge ne peut laisser sans indemnisation; qu'en décidant au contraire que Monsieur X... n'aurait perdu aucune chance d'éviter le risque qui s'est réalisé et auquel le docteur Y... l'a exposé sans l'en informer, la cour d'appel a violé les articles 16-1, 16-2 et 1147 du Code civil ».

b-Dans le secteur public

Le Conseil d’Etat a également reconnu le préjudice moral autonome d’impréparation, en cas de manquement du Praticien à son obligation d’information. Toutefois, contrairement à la Cour de cassation, celui-ci refuse d’indemniser le patient lorsque le risque ne s’est pas réalisé.

Arrêt du Conseil d’Etat, 10 octobre 2012, n° 350426 « Considérant qu'indépendamment de la perte d'une chance de refuser l'intervention, le manquement des médecins à leur obligation d'informer le patient des risques courus ouvre pour l'intéressé, lorsque ces risques se réalisent, le droit d'obtenir réparation des troubles qu'il a pu subir du fait qu'il n'a pas pu se préparer à cette éventualité, notamment en prenant certaines dispositions personnelles ; (…) que, contrairement à ce qu'il soutient, la cour administrative d'appel n'a pas commis d'erreur de droit en ne déduisant pas de la seule circonstance que son droit d'être informé des risques de l'intervention avait été méconnu, l'existence d'un préjudice lui ouvrant droit à réparation »

CONCLUSION

Compte tenu de l’évolution jurisprudentielle de plus en plus favorable aux patients, il est indispensable pour le Praticien de respecter son obligation d’information dans toute son étendue.

Lorsqu’un risque survient, le Praticien doit rester ouvert vis-à-vis de son patient.

Le patient doit se sentir compris, soutenu et écouté. Dans le cas contraire, le risque de contentieux s’accroît.

En cas de réclamation/contestation du patient, il est indispensable que le Praticien reconnaisse les « faits ». Il ne doit toutefois jamais reconnaître une « faute », synonyme de responsabilité.

Il doit également contacter immédiatement son assureur qui se chargera de sa défense en mandatant des avocats.