DECES LORS D’UNE HEMORRAGIE DE LA DELIVRANCE PAR DEFAUT DE SURVEILLANCE

Faits :

La patiente était décédée à la suite de son accouchement du fait d'une hémorragie de la délivrance due à une déchirure obstétricale du col de l’utérus et du vagin.

Expertise :

" Les décès par hémorragies de la délivrance, de cause recensée, constituent des accidents normalement évitables. Leur survenue peut être attribuée à un retard au diagnostic et à la prise en charge de l’hémorragie.

Le décès de la patiente aurait pu être évité s’il n’y avait pas eu de défaut de surveillance dans le post-partum et si les décisions prises par les deux gynécologues-obstétriciens avaient été transmises aux sages-femmes.

1) On peut établir a posteriori qu’une reconnaissance par la sage-femme de l’importance et de la gravité de l’hémorragie de la délivrance aurait permis une prise en charge chirurgicale plus précoce du saignement génital. Ce retard au diagnostic est principalement responsable de l’enchaînement des complications et de l’issue tragique survenue ultérieurement.

2) On peut également établir qu’en l’absence d’alternative thérapeutique, une hystérectomie d’hémostase devait être décidée par l’associé du gynéco-obstétricien dès l’échec des sutures vaginales qu’il avait entreprises.

3) Une hystérectomie d’hémostase décidée un peu plus tard par le gynéco-obstétricien de la patiente n’aurait très probablement pas permis d’éviter la survenue du choc hémodynamique, constaté peu après son intervention sur le vagin, même si cette hystérectomie représentait, encore à ce moment, le seul moyen capable de s’opposer, avec quelque chance d’efficacité, à l’issue fatale ultérieure.

4) La clinique ne disposant pas d’un bloc chirurgical facilement accessible depuis la salle de travail n’a pas offert toutes les conditions de sécurité attendues de la part d’une clinique d’accouchement exposée à ce genre de complication hémorragique brutale.

5) L’approvisionnement en sang demandé par l’anesthésiste n’a pas été réalisé avec la promptitude requise de la part de la banque du sang qui a prétexté des réglementations qui sont « caduques » en cas d’extrême urgence (…)".

Jugement :

Sur la sage-femme :

« Les suites de couche relevaient de la surveillance de la sage-femme à qui il incombait, s’il se produisait une pathologie, notamment une hémorragie anormale, de prévenir le médecin ». « Le saignement de la délivrance existait, durable et anormalement abondant. La sage-femme en avait sous-estimé la gravité au cours de la première heure ayant suivi l’accouchement ».

La sage-femme a donc commis une faute directement responsable du décès de la patiente.

Sur l'associé gynécologue-obstétricien :

Il a correctement établi le diagnostic de déchirure vaginale et cervicale, en pratiquant une révision utérine et un examen sous valves chirurgicales et en suturant les plaies.

Mais dans la mesure où le méchage palliatif était inefficace, que l'hémorragie persistait et que la patiente n'était pas transférable, il aurait dû soit réaliser une hystérectomie d’hémostase, soit une ligature des artères utérines ou hypogastriques.

Il a donc privé la patiente d'une chance de survie.

Sur le gynécologue-obstétricien traitant :

Aucune faute ne lui est reproché dans la mesure où il n’aurait pas eu le temps, compte-tenu du délai nécessaire pour pratiquer l’anesthésie, de réaliser une hystérectomie d’hémostase lorsque était survenue une défaillance hémodynamique brutale chez la patiente.

= > perte de chance de 30 % retenue par le Tribunal de Grande Instance.

Arrêt de la Cour d'appel qui confirme le jugement mais retient une perte de chance de 90 % :

  • Prononce la responsabilité du Gynécologue-obstétricien traitant car il avait confié sa patiente à son associé sans l’ accord de ce dernier et sans en informer la sage-femme qui avait vainement tenté de le joindre, compromettant ainsi les chances de survie du fait d'une perte de temps dans la prise en charge de la complication.

  • Prononce la responsabilité de la Clinique car contrairement à la réglementation en vigueur, le transfert de la patiente de la salle de naissance au bloc opératoire qui impliquait un changement d’étage avait contribué à rendre plus difficile un recours à une hystérectomie en extrême urgence.

En conséquence :

Indemnisation de 243 000 € à la charge de la clinique car la sage-femme salariée a été retenue responsable du dommage à 60 %) + responsabilité de l’associé du gynéco-obstétricien traitant à hauteur de 25 % et du Gynécologue traitant à hauteur de 15 %.

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